Source : Bulletin SHAP, tome XV (1888),
pp. 94-105.
LES SEIGNEURS DE BERGERAC
(Suite).
Marguerite de TURENNE, vicomtesse en
partie de Turenne, dame de Bergerac, de Gensac, etc., Et Noble RENAUD III, sire
de Pons, seigneur de Montignac.
Marguerite de Turenne épousa Renaud de Pons en 1251 ou 1252 ; elle lui
apportait en dot les deux terres de Bergerac et de Gensac. A peine en
possession de ces fiefs, Renaud de Pons fut fait prisonnier parle roi
d'Angleterre, sous prétexte de refus d'hommage. « Cette double exécution,
disent MM. Martial et Jules Delpit, dans leur Notice d'un manuscrit de la
bibliothèque de Wolfenbuttel, donna lieu à
un double procès que saint Louis paraît avoir évoqué au Parlement de Paris en
1253, et qui n'était pas encore terminé en 1262[1]. »
Par mandement du 2 août 1254, Marguerite fut assignée à comparaître
devant Henri III, roi d'Angleterre, partout où il se trouverait en Gascogne, la
seconde fête après l'Assomption, pour répondre sur divers articles au sujet
desquels elle avait déjà été ajournée, et notamment en ce qui concernait le
fief de Bergerac[2].
Elle fut également citée la même année, à la Sauve-Majeure, par-devant
Edouard, fils aîné du roi d'Angleterre, afin de justifier de ses droits à
l'héritage de son père. Elle s'excusa, par une lettre adressée au prince, de ne
pouvoir comparaître en personne : car elle était à la veille d'accoucher, et
elle ne pouvait, ajoutait-elle, réclamer ses droits sans l'autorisation de son
mari, qui se trouvait au loin hors de sa patrie. Elle chargeait en conséquence
un clerc, Me Elie Gros, porteur de sa missive, de faire valoir ses excuses, et
elle suppliait le prince de les agréer [3].
Pendant ce temps, et conformément à un ordre du 12 juin 1-254, les
troupes du roi d'Angleterre étaient venues assiéger le château de Bergerac.
Louis IX, roi de France, informé de cette agression, donna ordre au sénéchal de
Périgord de se rendre en personne dans la place investie, et d'exhorter de sa
part ceux qui s'y trouvaient à la défendre vaillamment, en fidèles vassaux[4]. Le sénéchal devait aussi requérir les soldats anglais de lever le
siège, en attendant qu'il eût été statué sur le point de savoir si le château
de Bergerac était de la mouvance de l'un ou de l'autre souverain. Le roi de
France faisait, de plus, enjoindre à tous les siens de s'abstenir de toute
hostilité contre Bergerac, et il leur faisait défendre de concourir, en aucune
façon , au ravitaillement de l'armée assiégeante (1254)[5].
Cinq ans après (1259), le traité d'Abbeville attribuait le Périgord à
l'Angleterre.
Selon toute probabilité, Marguerite de Turenne prit occasion du
rétablissement de la paix pour se rapprocher d'Henri III. Par acte du 19 avril
1259, elle reconnut que ses auteurs tenaient des ducs de Guyenne, et
qu'elle-même tenait de Henri, roi d'Angleterre, les châteaux de Bergerac et de
Gensac ; elle lui en fit hommage, ainsi que de toutes ses possessions du chef
de son père dans les diocèses de Bordeaux, Périgueux, Bazas et Cahors ; elle
s'engageait, en outre, à fournir à l'année royale deux chevaliers pour Bergerac
et un pour Gensac[6] .
Renaud de Pons dut être relaxé peu de temps après le traité et l'hommage
rendu par sa femme.
Le 22 mars 1202, Louis IX manda à Henri, roi d'Angleterre, comme duc de
Guyenne, de recevoir l'hommage que lui offraient Renaud de Pons et sa femme[7].
« Au mois d'avril de celle année
(1262), rapportent MM. Martial et Jules Delpit[8], la Cour de Gascogne étant
assemblée dans le préau de l'archevêché de Bordeaux, Renaud de Pons, Marguerite
de Turenne et le roi d'Angleterre comparurent par procureurs devant B.... évêque
de Bazas, Amanieu d'Albret, Pierre de Bordeaux et Jean de Lalande, sénéchal du
Limousin, du Quercy et du Périgord, commissaires délégués par le roi
d'Angleterre pour convoquer la Cour de Gascogne et la tenir en son lieu et
place.
Les procureurs de Renaud de Pons et
de Marguerite de Turenne exposèrent que Rudel, père de ladite Marguerite, était
au moment de sa mort en possession du château de Gensac, et demandèrent à être,
en conséquence, investis de la saisine dudit château et admis à prêter au roi
hommage, et fidélité. L'oncle de Marguerite, qui était présent, s'opposa à
cette demande, soutint qu'il avait été dépouillé du château de Gensac par le
roi, et demanda à être remis en possession de ce chef. On invoqua alors au nom
de Renaud de Pons et de Marguerite de Turenne un jugement rendu en leur faveur
par la Cour du roi de France ; mais leurs adversaires, les procureurs du roi
d'Angleterre, répondirent que cette allégation n'était point prouvée, et
conclurent à ce que la garde du château de Gensac leur fût remise. La Cour fit
droit à leur réclamation.
Rudel adhéra à
ce jugement ; mais Renaud de Pons et sa femme déclarèrent en appeler à la Cour
du roi de France. On dressa néanmoins acte de la sentence, et tous les membres
de la Cour y apposèrent leurs sceaux. La liste de ces signataires donne une
idée de la manière dont était composée au XIIIe siècle la Cour de
Gascogne. A côté des premiers barons de la province, on y voit figurer les
maires des principales villes, ceux de Bordeaux, de Bayonne, de Dax, de
Saint-Emilion et de Bourg[9].
L'année
suivante, une sentence arbitrale prononcée par la reine Marguerite, régente du
royaume en l'absence de saint Louis, mit fin au second procès que la possession
du château de Bergerac avait suscité entre les mêmes parties. Par cette
sentence, la reine décida que la terre de Bergerac serait restituée à Renaud de
Pons et à Marguerite de Turenne, moyennant une somme de dix mille livres
tournois, donnée au roi d'Angleterre, à titre de compensation, et dont le roi
de France garantirait le paiement.
Cette
restitution, qui plaçait les habitants de Bergerac sous la dépendance d'un
autre seigneur, ne pouvait avoir lieu sans leur consentement : aussi leurs
magistrats municipaux intervinrent-ils dans la transaction qui précéda le
jugement arbitral ; et le rédacteur de l'acte eut soin de rappeler : 1° que le
prévôt Gauthier, le chevalier Aimeri de Preneuf et Pierre Seignenal, bourgeois
de Bergerac, procureurs des maire, bourgeois et de toute la commune de cette
ville, avaient consenti à ce qu'elle fût restituée à Renaud de Pons et à sa
femme , nonobstant la promesse que le roi d'Angleterre leur avait faite de ne
jamais mettre leur ville hors de sa main ; 2° que les mêmes procureurs
s'étaient engagés à envoyer à la reine médiatrice, au Parlement de la
Pentecôte, les lettres par lesquelles le prince Edouard leur avait accordé une
mairie, une commune et divers privilèges et franchises dans la terre d'Hélie
Rudel et dans d'autres lieux ; 3° qu'ils avaient renoncé à ces concessions et
dégagé de tous engagements envers eux le roi d'Angleterre et le prince Edouard,
son fils, qui, de leur côté, les avaient déliés de leur serment de fidélité.
Indépendamment des dix mille livres
qu'ils doivent payer au roi d'Angleterre, Renaud de Pons et Marguerite de
Turenne renoncent à réclamer les revenus perçus par ce prince, et s'engagent à
n'exercer aucune vengeance contre les habitants qui ont suivi son parti, et
spécialement contre le prévôt Audebert et ses adhérents. Ils leur accordent, à
cet effet, des lettres de rémission, et qui, pour plus de garantie, devront
être scellées du sceau du roi de France. Le roi d'Angleterre et le prince
Edouard ne conserveront, dans la ville de Bergerac, que les droits qu'ils y
avaient du temps d'Hélie Rudel. Quant à l'hommage, Renaud de Pons et Marguerite
de Turenne seront autorisés à le prêter entre les mains du sénéchal de Gascogne,
en attendant qu'ils puissent le faire entre les mains du roi lui-même. Enfin,
la reine Marguerite se réserve, pendant deux ans, le droit d'expliquer ou
d'amender tout ce qui pourrait paraître douteux ou obscur dans sa sentence. »
Des lettres des reines d'Angleterre et de France, Aliénor et Marguerite,
adressées au mois d'août 1264 à Pierre de Bordeaux, lieutenant du sénéchal de
Gascogne, lui ordonnèrent de mettre Renaud de Pons et Marguerite de Turenne en
possession de la terre de Bergerac[10]. En juin 1267, Henri III accepta et approuva la sentence de Marguerite
de France et fit grâce à Renaud et à sa femme de tout le passé.
On conjecture que Renaud de Pons mourut en 1270, la même année que saint
Louis, qu'il avait accompagné à la croisade. Il laissait deux fils, Hélie Rudel
et Godefroid.
En 1270, Marguerite épousa eu secondes noces Alexandre de la Pébrée[11].
Au mois d'avril 1273, Marguerite déclara qu'elle tenait d'Edouard, roi
d'Angleterre, à titre de fief immédiat, Bergerac et ses dépendances ; elle
s'obligeait à fournir à ce souverain trois chevaliers pendant soixante jours;
au bout de ce temps, le prince pouvait les garder à ses frais. La dame de
Bergerac reconnut par le même acte que le château de Gensac avec ses
dépendances était un fief immédiat du duché de Guyenne[12].
Marguerite de Turenne fit son testament le 7 des calendes de février de
l'année 1289. Elle instituait son fils Hélie Rudel, chevalier, héritier du
château et des châtellenies de Bergerac, Mouleydier et Gensac. La vicomte de
Turenne était attribuée à son autre fils, Godefroid de Pons. Marguerite plaçait
son testament sous la protection du roi de France, du sénéchal de Gascogne pour
le roi d'Angleterre, d'Henri, archevêque de Bordeaux, et de Raymond, évêque de
Périgueux[13].
Elle avait fait don, en 1260, de 50 livres de rente aux Frères prêcheurs
qui étaient venus s'établir la même année dans la ville de Bergerac. Elle fut
ensevelie dans leur église, et sur son tombeau l'on grava une épitaphe en vers
latins qui retraçait les vertus publiques et privées de la noble dame[14].
Alexandre de la Pébrée mourut en 1301. M. Dessalles rapporte qu'il avait
reçu d'Edouard d'Angleterre la seigneurie de Puynormand, sur laquelle
Marguerite avait quelques droits de son vivant.
Élie de Biran.
PIÈCES
JUSTIFICATIVES.
I
1254. — Rex Margaritae de Turena, uxori Reginaldi de Pontibus, salutem. —
Mandamus vobis quatinus, secunda festa post Assumptionem beatae Mariae Virginis,
tempestive compareatis, coram nobis, ubicumque fuerimus in Vasconia, factura
nobis et aliis, et receptum quod ordo dictaverit rationis, tam super defectibus
dierum vobis a nobis assignatarum legitime, quam in questionibus quae, pro
feodo Brageraci et rerum aliarum, contra vos proponentur. Teste Rege in Castris apud Girundam
11 die Augusti, anno ut supra. (Bibliothèque
nationale. Mss. de Bréquigny, 2 août 1254. — Lespine, vol. 156, page 125.)
II
1254. — Lettre de Marguerite
de Turenne, dame de Bergerac, pour demander à Edouard, fils aîné du roi
d'Angleterre, un délai pour justifier de ses droits.
Exellentissimo Edwardo, illustris regis Angliae primogenito et heredi,
Margareta de Turena, domina Brageraci et Genciaci, de jure et de facto, quando
sibi placuerit, salutem cum reverentia honorabili.
Quando ad diem martis proximam post dominicam medie Kadragesime quam nobis
apud Silvam Majorem Burdegalensi Diocesi, assignatis ut comparemus coram vobis,
prosecutura jus quod habebamus apud hereditatem bonae memoriae Domini Heliae
Rudelli, quondam patris nostri, coram vestrae Majestatis excellentia, non
possumus personaliter comparere, cum in filii puerperio decumbamus, et dominus
Reginaldus de Ponte, maritus noster, longe sit absens, extra patriam, sine
cujus auctoritate jus nostrum prosequi non valemus, maxime, cum dilacio
veniendi ad vos nobis indulta, artissimum cause arduitate, et conditione
persone citate, pensatis contineat intervallum propter quod minus legitima dicta
citatio, salvo honore vestro, merito est consideranda. Dilectum et specialem
clericum nostrum magistrum Eliam Gros, latorem presentium, excusatorem nostrum
propter causas premissas, ad vestrae celsitudinis presentiam destinamus, dantes
eidem excusatori speciale mandatum et potestatem jurandi in animam nostram,
predictas excusationes causas, si necesse fuerit, esse veras, serenitati vestrae
humiliter supplicantes, ut nostram, ex premissis causis, ad dictam diem,
absentiam habere dignemini excusatam ; et haec vobis per presentes significamus
litteras, sigillo nostro signatas, in testimonium veritatis. Datum apud
Ribeiracum die sabati, ante dominicam qua cantatur Lœtare Jerusalem, anno Domini millesimo
ducentesimo quinquagesimo quarto.
(Lespine, vol. 156, page 127.) — Mss, de Bréquigny, sur la copie faite à
Londres.
III
1254. — Ludovicus, Dei gratia Francorum rex, Senescallo Petracoricensi, salutem.
Ex relatione quorumdam intelleximus quod gentes regis Angliae illustris
castrum de Brageriac, quod est Reginaldi de Pontibus, obsederunt. Quo circa
mandamus vobis quatenus ad dictum castrum personaliter accedentes gentibus in
dicto Castro existentibus ex
parte nostra dicatis, eosdem efficaciter inducentes ut in auxilium domini sui
Reginaldi de Pontibus viriliter se habentes dictum castrum ad opus domini sui
predicti ab impugnatione adversariorum tueantur, maxime cum idem Reginaldus in
prisione dicti Regis sit detentus. Gentes siquidem regis Anglie, et Eduardum
dicti regis filium, si ibidem fuerint, ex parte nostra requiratis, quod
obsidionem ex inde amoveant quousque per dictatores treugarum initarum inter
nos et dictum regem, vel alteros per quos debuerit et fuerit terminatum utrum
de nostro, seu regis Anglie feodo moveat dictum castrum. Militibus vero et
aliis de regno nostro in exercitu predicto existenlibus ex parte nostra
firmiter injungatis ut exinde recedant nec gentibus dicti castri aliquam
violentiam seu dampnum aliquod inferre presumant. Ceterum omnibus sub potestate
nostra constituas inhibeatis firmiter et districte ne victualia aliqua ducant,
vel duci faciant ad exercitum ante dictum. Actum Parisiis die veneris post
festum Sancte Lucie virginis, anno Domini millesimo ducentesimo quinquagesimo
quarto.
(Lespine, vol. 48,
f° 4.)
IV
1259. — Margareta de Turenna obligavit se tenere specialiter pro dicto castro
Brageriaco et pertinenciis , nomine exercitus , duos milites in obsequio ; et
pro castro de Genciaco et pertinenciis , unum militem ; et alia, si qua forte
pro hiis et aliis supra dictis, secundum communem usum et legem patrie, aut
specialiter domino feodi debentur et tenere. — Actum et datum apud Londinum,
undevicesima die aprilis, anno Domini millesimo ducentesimo quinquagesimo nono.
(Lespine, vol. 156, p. 127; voir aussi, dans la même collection, vol. 51, p. 257.)
V
1262. — Ludovicus, Dei gratia Francorum rex, carissimo consanguineo Henrico, eadem gratia regi
Angliae illustri, Domino Hiberniae, ac duci Aquitaniae fideli suo salutem et
sincere dilectionis affectum. Mandamus vobis tanquam duci Aquitaniae, quatinus
Renaudo de Pontibus et ejus uxori, super homagio quod vobis offerunt de
Genciaco et ejus pertinente, certam diem et certum locum assignetis in Vasconia,
et illud homagium seu ejus fidelitatem recipiatis ibi vel recipi faciatis,
secundum quod procuratoribus vestris per jus fuit in Curia nostra dictum ,
litterasque vestras apertas eidem Renaudo et ejus uxori sufficientes mittatis
de conductu eundo ad dictam diem et dictum locum ac etiam morando ibidem propter
hoc et inde redeundo. Preterea senescallis vestris Vasconiensi et
Petragoricensi, per vestras mandetis litteras, ut testes de eorum senescalliis, quos idem Renaudus et
ejus uxor sibi nominaverint, usque ad duodecim personas, coram nobis adjornent
ad instantem quindenam Penthecostem ad faciendum testimonium in causa quam
habent dictus Renaudus et ejus uxor contra vos coram nobis. Taliter ipsum
Renaudum et ejus uxorem de predicto expediente homagio, infra predictam
quindenam Penthecostem, ne super causa Brageracii, quam contra vos in nostra
habent curia valeant impediri. — Datum Parisiis, die Jovis ante Lœtare Jerusalem. (Lespine, vol. 156, p. 139.)
VI
1273. - Hommage au roi d'Angleterre comme duc d'Aquitaine, par
Marguerite de Turenne, dame de Bergerac.
Noverint universi, etc., quod anno Domini millesimo
ducentesimo septuagesimo tertio, mensis martis, in praesentia magistri Pontii
Amici, notarii apostolici, etc., nobilis domina de Turena, domina de Brageyraco
et de Genciaco, recognovit quod ipsa tenet et tenere debet et antecessores sui
tenebant ab antiquo, in feudum immediate, ab illustri domino rege Angliae,
domino Hiberniae, duce Aquitaniae, domino Edwardo et suis antecessoribus,
castrum Brageraci, cum castellania et pertinentiis, videlicet Castro de Bridoira, Castro de Montis-Leyderii, cum pertinentiis
omnibus ipsorum castrorum terris et tenentiis Baionosii : similiter quidquid
apud Issigiacum et in terris et tenentiis Marmonteslesii, Castro de Cunhac, cum honore et pertinentiis, Castro de Biron, cum pertinentiis, Castro de Badefols, cum pertinentiis, vice-comitatum
de Castillione et de Podio Normani, cum eorum castellaniis et pertinentiis
omnibus. Pro quibus, omnibus et affario de Monte-Revelli, debet praedicto
domino regi facere homagium ligium et fidelitatem, juramentum, ac exercitus
obsequium cum tribus militibus per sexaginta dies, et sexaginta dies completis,
rex potest eos retinere ad expensas suas, si velit. Insuper, recognovit
praedicta domina Margarita, quod tenet ab eodem domino Rege, in feudum immediate,
castrum de Genciaco, cum pertinentiis, similiter castrum de Castro-Mourone, cum
honore et pertinentiis, et quidquid habet apud Riulam, intus et extra, ratione honoris castri, et pro
his castris, videlicet de Genciaco et de Castro-Mourone, cum eorum pertinentiis, eadem domina
recognovit et dixit, quod debet facere homagium ligium dicto domino regi et
fidelitatem, juramentum et obsequium exercitus cum uno milite, et jus facere et recipere per
pares suos, coram eo, in sua Curia
Vasconiensi, etc.
(Extrait des Archives de Bordeaux, f°s 36 et 37). - Lespine, vol. 156,
page 146).
VII
Testament de
Marguerite de Turenne, dame de Bergerac et de Gensac.
1289. — In nomine
Patris, et Filii, et Spiritus sancti. Amen.
Nos, Margarita de Turena, Brageriaci et Genciaci
domina, sana mente, aegra corpore, cogitantes de supremis, testamentum nostrum
seu ultimam voluntatem nostram, condimus, ordinamus et facimus in hune modum. —
Inprimis, damus et concedimus omnipotenti Deo animam nostram, etc. — Item,
legamus Domino Alexandre de La Prebeya, marito nostro, mille libras renduales
ad vitam suam, lantum in cas Iris et castellaniis de Genciaco et de
Castromaurone. — Item, legamus Margaritae, filiae nostrae, centum libras
renduales et mille libras semel solvendas. — Item, legamus Joannae, filiae
nostrae centum libras renduales, et mille libras semel solvendas, et in praemissis
easdem Margaritam et Joannam haeredes nobis instituimus. Item, legamus Audae et
Alliz et Isabellœ, filiabus nostris, cuilibet vigenti quinque libras renduales,
ultra dotes sibi promissas, etc. Item, legamus dominae Geraudae, filiae nostrae,
uxori domini Arnaudi de Girunda, militis, quinquaginta libras renduales ultra
dotem sibi promissam, etc. — Item, legamus Margaritae, filiae dicti domini de
Girunda, vigenti quinque libras renduales. — Item, facimus et instituimus
Heliam Rudelli, militem, filium nostrum, haeredem in Castro et castellaniis de
Brageriaco, de Monte-Leyderii et de Genciaco. — Item, Gaudefridum de Ponte,
filium nostrum, facimus et instituimus in omnibus et singulis castris et castellaniis
nostris, videlicet de Castro-Mourone. de Riberaco, de Espelucha, de Monteforti,
de Alhac, de Chaluscio, de Archa, de Croycha, de Martello, de Cunbac, de
Montibus, et in tota terra de Bayanesio, et in omnibus juribus, homagiis,
feudis et retrofeudis, deveriis, reditibus et pertinentes existentibus in
vice-comitatu Turennae. Si vero dictum Heliam, vel filium suum sine haerede
masculo mori contingent, haeredem eidem Heliae vel filio suo substituimus
dictum Gaufredum, filium nostrum, vel heredem ipsius Gaulredi masculum. Si vero
dictum Gaufredum mori contigerit sine haerede, Raymundum nepotem nostrum,
filium quondam vice-comitissae Turennae, quondam filiae nostrae, heredem eidem
substituimus. Si vero idem Raymundus moreretur sine haerede masculo,
substituimus eidem Raymundum, haeredem masculum domina; Geraudae filiae nostrae
predictae, uxoris Arnaudi de Girunda, predicti, etc. Item, volumus et ordinamus
quod omnia debita quae nobis debentur ex quacumque causa et specialiter debita
in quibus nobis tenetur dictus Helias Rudelli, filius noster, dominus de Ponte,
solvantur executoribus nostris infra scriptis, etc. — Hujus vero testamenti,
seu ultimae voluntatis nostrae executores facimus, constituimus et ordinamus
discretos viros dominum Guillelmum de Ture, venerabilem archidiaconum
Petracoricensem, Heliam Galleri, canonicum Petracoricensem, et dominum Aymericum
de La Porta, militem, etc. Protectores autem hujusmodi testamenti nostri esse
volumus excellentissimum hominem nostrum Regem Franciae, illustrissimum ac
nobilem virum senescallum Vasconiae pro domino nostro illustri rege Angliae,
duce Aquitaniae, et reverendos patres in Christo dominos Henricum, Dei gratia
archiepiscopum Burdegalensem; Raymundum, eadem gratia episcopum
Petracoricensem, etc.; testes autem hujus testamenti nostri per nos specialiter
vocati et rogati, dictus Raymundus episcopus Petracorensis, dominus Pontius de
Baynaco, dominus ejusdem loci, Gaudefridus de Ponte predictus, etc.; quibus nos
dicta suplicamus ut sigilla sua, una cum sigillo nostro proprio , quo utimur praesenti
testamento nostro apponerent. Datum et actum septima kalendarum februarii, anno
Domini millesimo ducentesimo octogesimo nono. (Lespine, t. 48, p. 17.)
VIII
1289. - Epitaphe de Marguerite de Turenne, dame de Bergerac, gravée
en vers latins sur son tombeau, dans l’église des Jacobins de Bergerac.
Larga, valens,
humilis fuit haec, princepsque virilis,
In sexu fragilis, in
sexu prorsus herilis,
Forma, genus,
mores, quia opes prosunt et honores,
In me prospice,
qui vis peritura sequi.
Sum Margarita,
gemmis, auro redimita,
Moribus et vita,
mundano morte potita.
Pons, Brageriacum,
Turene mihi dominatum,
Atque Ribeiracum
donarunt undique latum.
Nunc mea versa
lyra, mortis variatur in ira.
Experior modo
recuncta caduca fore,
Jam mea forma, cinis
mortis resoluta ruinis,
Scandere dum
conor, sternitur altus honor.
Qui legis haec,
pro me Domino suffragia prome,
Sum quod ego fies, sed latet hora, dies.
Ordo dilecte
fratrum sancti Dominici,
Queso, Deum flecte
cum prece multiplici.
(Imprimé dans Justel, livre 1, Preuves de la Maison de
Turenne, p. 49.) (Lespine, collection du Périgord, vol. 156, page 166.)
Nous avons constaté que ce document ne figure pas dans le recueil cité
par l'abbé Lespine; c'est pour ce motif que nous avons cru devoir le reproduire
ici.
[1] P. 133, Paris, Imprimerie royale, M DCCC XLI.
[2] V. Pièces justificatives I.
[3] V. Pièces justificatives II.
[4] Les habitants de Bergerac devaient être peu disposés à se rendre à ces exhortations : en effet, dans son Histoire du Périgord, M. Léon Dessalles mentionne des lettres du 12 janvier 1255, par lesquelles le maire, les chevaliers et toute la communauté promettaient à Henri III et à son dis Edouard que si Renaud et Marguerite ne s'étaient pas présentés à Pâques devant la Cour, ils reconnaîtraient les princes anglais pour leurs seigneurs.
[5] V. Pièces justificatives III.
[6] V. Pièces justificatives IV.
[7] V. Pièces justificatives V.
[8] Notice d'un manuscrit de la bibliothèque de Wolfenbuttel, p. 133 et suivantes.
[9] Nous renvoyons à la Notice de MM. Martial et Jules Delpit pour le texte de ce jugement et de la sentence arbitrale de la reine Marguerite dont il va être parlé.
[10] Voici en quels
termes le roi d'Angleterre avait donné pouvoir à la reine de France de terminer
le différend :
(1364). — Lettre de Henri III, roi
d'Angleterre, à Marguerite, reine de France, femme de saint Louis. (Affaire de Bergerac.)
De plena potestate
Margaritae, reginae Francis, super facto Bregeriaco. Universis, ad quos
presentes litterae pervenerint, Henricus, Dei gratia, etc., salutem. Noveritis
nos excellenti dominae et sorori Karissimae Dominae Margaretae, reginae Franciae,
illustri, plenam dedisse potestatem componendi, transigendi et pacem seu
concordiam, nomme nostro, faciendi super feodo Brageriaci et pertinents ipsius
cum Reginaldo de Pontibus et Margareta de Turena, uxore sua, prout melius
viderit expedire.
Datum habituri et firmum
quidquid per dictam Dominam Reginam, vel cum ipsa, loco Nostri, actum fuerit in
premissis. - In cujus, etc… Datum apud Wits, 8 Die februarii.
(Imprimé dans Rymer). - Anno 1264. - (Lespine, vol. 158, p. 140).
[11] « En 1276, il fut rendu hommage à noble baron et seigneur Alexandre de la Peberea, comme mari de Marguerite de Turenne, dame de Bergerac et de Gensac, et de son consentement, par Gaston de Gontaut, seigneur de Badefol, à raison du château de Badefol et ses appartenances. Il reconnaît qu'il doit audit seigneur de Bergerac une lance d'acapte à mutation de seigneur, comme il est porté par cet acte d'hommage du 13 mars 1276, devant Compnhac, notaire ». (Lespine, volume 48, page 331.) En 1283, Pierre de Gontaut rendit hommage à Marguerite de Turenne à raison du même château.
[12] V. pièces
justificatives VI. - Marguerite de Turenne, dit l'abbé Lespine, sans citer
aucune date, rendit foi et hommage au roi d'Angleterre, duc de Guienne, pour
raison des château et châtellenie de Bergerac et de Mouleydier, Montcuq,
Montaut, Bridoire, Castillon et autres châtellenies, châteaux, terres et
devoirs compris.
« Il fut fait, ajoute-t-il,
un traité de composition entre elle et Edouard, roi d'Angleterre, concernant
Bergerac et la terre de Benauges, paroisses de Naussannes, Monsac et autres
lieux, auquel traité sont annexées certaines lettres des consuls et commune de
Bergerac, portant qu'elle reconnaît tenir à hommage du roi d'Angleterre
Bergerac et Gensac. » (Lespine, vol, 48, p. 334.)
D'autre part, dans leur remarquable édition des chroniques de Jean Tarde (Paris, 1887, page 90), MM. Gaston de Gérard et Gabriel Tarde signalent, à propos de la bastide de Roquépine, une transaction passée en 1583 entre Jean de Grailly sénéchal du roi d'Angleterre, et Marguerite de Turenne, confirmée par lettres d'Edouard Ier, du 31 août 1283.
[13] Pièces justificatives VII.